Papa était pilote. Enfants, nous avons vu ces gros frelons d’après guerre ; ils avaient des hélices immenses et semblaient toujours prêts à s’envoler ; j’en étais pétri de béatitude. Mais ce couillon ne pensait qu’à sa gueule, il ne m’a jamais fait grimper dans le cockpit d’un de ces engins de rêve. Alors pourquoi ai-je fait Veto ? Parce que j’aimais les sciences? Pour faire chier le vieux qui n’est jamais allé loin dans les études ? Tout à la fois. Ma mère, amoureuse de ce trou duc, jalouse, excessive, possessive et trompée, s’éclatait dans ce qu’elle aimait, peinture, écriture, musique. Ils se sont séparés, de ces séparations sordides, procédurières, qui font la fortune des gens de loi, nous laissant seulement en héritage le désir de peindre, voler, écrire et, aussi, s’envoyer en l’air.